Toi, moi et le cancer – Quand le partenaire devient soignant : comment rester amant·e ?
- Annaëlle KERYER
- 6 oct.
- 3 min de lecture
Lorsqu’une maladie grave comme le cancer s’invite dans la vie d’un couple, elle bouleverse tout : le quotidien, les projets, l’énergie, le rapport au corps… et la place d’amoureux·se. Bien souvent, le ou la partenaire-soignant·e prend naturellement le rôle de partenaire de soutien. On s’occupe des rendez-vous médicaux, on surveille les effets secondaires, on soutient moralement. Ce rôle est essentiel et précieux. Mais il vient parfois éclipser une autre place vitale : celle d’amoureux·se.
Le basculement de rôle : de l’amant·e au soignant·e
Ce basculement de rôle se fait rarement consciemment. Il s’impose au fil des traitements, des fatigues, des hospitalisations. Le partenaire se met à veiller, protéger, rassurer. Mais à force de se tenir dans cette posture, il peut perdre le lien à son propre désir, ou ne plus oser exprimer son besoin de tendresse et de sexualité.
Pour la personne touchée par le cancer, le vécu est double : gratitude infinie envers le soutien reçu, mais aussi peur d’être réduite à sa maladie, de ne plus être regardée comme un·e partenaire de désir. Ce décalage peut créer une profonde solitude des deux côtés : celui qui accompagne et ne s’autorise plus à désirer, et celui qui se soigne et se sent diminué dans son identité d’homme, de femme, d’amant·e.
Ce que cela crée dans la relation
Culpabilité : la personne concernée peut se sentir coupable de “priver” son partenaire de sexualité. Le partenaire peut se sentir coupable de désirer malgré la maladie.
Déséquilibre : la relation se centre sur les soins, la logistique, la survie. La dimension amoureuse s’efface.
Solitude : chacun vit ses peurs en silence. La sexualité devient tabou, et avec elle l’intimité.
Ces non-dits pèsent lourd. Le couple risque alors de ne plus se retrouver dans l’espace de l’intime, pourtant si précieux face à la maladie.
Comment rester amant·e malgré la maladie ?
Il ne s’agit pas de “forcer” le désir ni de faire comme si rien n’avait changé. Mais de trouver de nouveaux chemins vers l’intimité, adaptés à la réalité de la maladie.
1. Ouvrir la parole, même maladroitement
Nommer le basculement de rôle est déjà un premier pas :
“Je sens que je suis devenu plus ton partenaire-soignant que ton partenaire, et ça me fait peur.”
“Je n’ose plus te montrer mon désir, je crains de te blesser.”
Ces phrases simples permettent de remettre de la vérité et de la tendresse là où le silence étouffe.
2. Inventer des rituels sensoriels
Retrouver un contact qui ne soit pas lié aux soins :
un massage des mains ou des pieds,
un moment de respiration consciente ensemble,
une caresse sur le dos, une étreinte en peau à peau, sans but sexuel.
Ces gestes réintroduisent la peau, la chaleur, la sensualité, sans pression.
3. S’autoriser un accompagnement de couple
Parler de sexualité pendant les traitement et/ou après un cancer est toujours difficile, même dans les couples solides. Consulter un thérapeute de couple ou un sexothérapeute permet d’avoir un espace protégé pour poser ces questions :
Comment se redire qu’on s’aime au-delà de la maladie ?
Comment réinventer une intimité qui nous convienne ?
Comment respecter nos limites tout en nourrissant le lien amoureux ?
Un message pour tous les couples
Ce sujet ne concerne pas seulement les couples hétérosexuels jeunes. Le cancer touche des femmes et des hommes de tous âges, de toutes orientations, de toutes histoires de vie. Chacun mérite d’être reconnu non seulement comme personne touchée, ou partenaire-soignant·e, mais aussi comme personne désirante, digne d’amour et d’intimité.
Comment je peux vous accompagner?
Dans mon cabinet, j’accueille aussi bien la personne qui traverse la maladie, que le ou la partenaire, seul·e ou ensemble.
Nous travaillons sur :
retrouver une identité sexuelle au-delà de la maladie,
explorer le toucher sensoriel et les rituels de reconnexion,
libérer la parole sur le désir, les peurs et les besoins,
déconstruire vos croyances sur le rapport sexuel, pour en découvrir d’autres.
Parce que rester amant·e malgré la maladie est un chemin possible, et profondément nourrissant pour traverser l’épreuve.




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